Entre réalité et prospective :
   L'armée de terre française en janvier 1989
 
David DELPORTE
 
 

ÉLÉMENTS ORGANIQUES DES CORPS D’ARMÉE ET DE LA FORCE D'ACTION RAPIDE


MISE A JOUR EN DATE DU 12 NOVEMBRE 2023


1 – PRÉSENTATION DES GRANDES UNITÉS :


En janvier 1989, en temps de paix, trois corps d'armée numérotés « 1 », « 2 » et « 3 » sont à l'inventaire des grandes unités de combat de l'armée françaises sous le commandement direct de la 1ère armée.


De plus, la Force d'Action Rapide (FAR), ayant la valeur d'un corps d'armée mais usant plus des prérogatives d'un corps expéditionnaire, agit soit directement les ordres de l'état-major de l'Armée soit (et exclusivement en temps de guerre) sous rattachement opérationnel à la 1ère armée.


Le 1er août 1969, la mise sur pied de l'état-major de la 1ère armée fait que les états-majors des 1er et 2ème corps d'armée prennent respectivement pied à Nancy (54) et Baden-Baden (Allemagne Fédérale), où ils fusionnent respectivement avec les états-majors des 6ème région militaire et forces françaises stationnées en Allemagne.


Les états-majors des 1er et 2ème corps d'armée créés respectivement le 1er août 1964 et le 1er avril 1951, sont jusqu'alors les derniers états-majors de corps d'armée alors en activité dans l'armée de terre. Il seront dissous pour le premier le 30 juin 1990 et pour le second le 31 août 1993.


L’état-major du 3ème corps d'armée, grand corps de commandement créé le 1er juillet 1979, est issu de la loi n° 77-531 du 19 juin 1976 portant approbation de la programmation militaire pour les années 1977-1982 qui réorganise les troupes de manœuvre.


Installé tout d'abord en 1ère région militaire avec poste de commandement commun à Saint-Germain-en-Laye (78), il migre ensuite en 1984 et fusionne donc son état-major avec celui de la 2ème région militaire à Lille (59). Il sera dissous le 30 juin 1998.


En cas de conflit contre les troupes du « Pacte de Varsovie », la 1ère armée et ses grandes unités de combat sont mises à disposition du « commandement centre » (CENTAG) de l’alliance atlantique et agissent en support des unités alliées déjà présentes en bordure des franges ouest du bloc oriental.


Il appert en effet que, malgré le fait du retrait du commandement intégré des forces de l’alliance atlantique, notre armée doit jouer un rôle bien spécifique. De par l'exercice franco-allemand de 1987 « moineau hardi », les forces françaises de la Force d'Action Rapide peuvent sans problème intervenir sur la frontière tchèque en soutien du 2ème corps d'armée allemand.


Il se dit mais cela demande à être vérifié que la 1ère armée française (et les 1er et 2ème corps d'armée) aurait à prendre place en première ligne et constituer dans le sud de l'Allemagne fédérale un front « Sud » en intégrant le 2ème corps d'armée allemand.

Rappelons pour mémoire que sur les trois corps d’armée, l’état-major du 2ème corps d'armée est le seul à être installé en République Fédérale Allemande et englobe en temps de guerre les deux-tiers des troupes françaises stationnant en ce pays.


Les 1er et le 3ème corps d’armée se trouvent sur le sol français et mutualisent respectivement leurs états-majors avec ceux des 6ème et 2ème régions militaires.


Comme nous avons pu le voir le 30 juin 1998, à l'instar de la 1ère armée dissoute le 31 août 1993, il ne reste plus rien des trois corps d'armée et autre Force d'Action Rapide. A leur place de ces cinq états-majors, est mis sur pied le 1er juillet 1998 l'état-major de la Force d'Action Terrestre (FAT).


Revenons à notre sujet principal.


Par définition et selon les directives en vigueur au 1er janvier 1989 (voir TTA105), le corps d'armée, de par son niveau de commandement :


a – conduit le combat aéro-terrestre dans le cadre d'un groupement antichar composé de ses éléments organiques (divisions blindées / d'infanterie / légères blindées « école »)


b – met en œuvre l'armement nucléaire tactique « pré-stratégique » (lanceurs Sol/Sol pré- stratégique « PLUTON ») sur ordre de l'état-major de la 1ère armée


c – assure le soutien logistique des grandes unités de combat dont il a le commandement par le biais de la brigade logistique affectée en son sein


En effet, l'organisation de l'armée de terre française en janvier 1989 est axée sur une défense de nos intérêts nationaux de par un engagement préventif sur le territoire de la République Fédérale Allemande.


L'ennemi annoncé, à savoir les troupes du « Pacte de Varsovie », devant vraisemblablement agir de par une attaque de troupes blindées soutenus par l’aviation tactique, l'action défensive des troupes du « Pacte atlantique » se base sur une contre-attaque antichar massive.


C'est en cela que les troupes de combat blindées et mécanisées sont regroupées au sein des six divisions blindées. D'autres troupes de combat, issues des unités de protection du territoire, désormais motorisées sur « véhicule de l'avant blindé » sont à même d'accompagner et d'exploiter l'action des divisions blindées. Elles sont regroupées au sein de deux divisions d’infanterie.


Des unités dites « légères blindées – école », mises sur pied par les écoles et les centres de formation à partir d’un matériel stocké et de troupes issues des élèves encadrées par les enseignants, doivent agir en deuxième rideau, elles sont dotées de matériels tant blindés que mécanisés ou motorisés.



Quid de la Force d'Action Rapide (FAR) ?


Cet état-major de niveau corps d'armée est mis sur pied le 1er juillet 1984 avec poste de commandement au quartier Gallieni à Maisons-Laffitte (78). Il sera dissous le 30 juin 1998.


Les unités rattachées à la Force d'Action Rapide sont principalement des troupes légères (troupes parachutistes et troupes de montagne) accompagnées de deux divisions légères blindées et d'une unité particulière, la division aéromobile alliant la manœuvre et la capacité antichars.


Présentons maintenant les unités organiques de corps d'armée.


Sans parler de la brigade logistique qui sera abordée dans les pages idoines, l'ensemble des éléments organiques du corps d'armée, d'une valeur globale de 16 000 hommes, est composé d’une manière théorique en temps de guerre de seize régiments divers, un groupe d'hélicoptères légers et un escadron d'artillerie se répartissant sous commandement direct du corps d'armée ou cinq commandements d'armes.


Ces éléments organiques du corps d'armée sont d’abord présentés ci-après dans le cadre d’un schéma synthétique. Ils se répartissent en :


  • une unité issue de l'Arme Blindée Cavalerie :

    • un régiment de reconnaissance


  • huit unités issues de l'Artillerie :

    • une escadron d'artillerie de corps d'armée

    • un régiment de surveillance et d'acquisition (radar RASIT et drone de reconnaissance CL89)

    • deux régiments d'artillerie Sol-Air à courte portée (missiles Sol/Air « ROLAND »)

    • deux régiments d'artillerie Sol-Sol à capacité nucléaire (missiles Sol/Sol « PLUTON »)

    • un régiment d'artillerie Sol/Sol (lanceurs LRM)

    • un régiment de défense « NBC »


  • deux unités issues de l'Aviation légère de l'armée de terre :

    • un régiment d'hélicoptères de combat

    • un groupe d'hélicoptères légers


  • deux unités issues de l'arme du Génie :

    • deux régiments de franchissement de corps d'armée


  • deux unités issues de l'arme des transmissions :

    • deux régiments de transmissions de corps d'armée


  • trois unités issues de l'Arme du Train :

    • deux régiments de circulation routière

    • un régiment de commandement de corps d'armée


En sus de ces dix-huit unités, nous dénombrons une compagnie de combat d'infanterie parachutiste, issue du 1er régiment parachutiste d'infanterie de Marine, qui est affectée de manière aléatoire à chaque corps d'armée. Elle œuvre comme compagnie de recherche du renseignement pour son corps support, de la même manière que les unités élémentaires du 13ème régiment de Dragons parachutistes au profit de la 1ère armée.


Toutes ces unités ne sont pas d'active. En effet, tous les régiments d'artillerie dotés d'obusiers 155 BF50 modèle 1950/1963 ou d'obusiers 105 HM2 et deux tiers des régiments de défense « NBC » et des groupes d'hélicoptères légers considérés comme éléments organiques de corps d'armée sont constitués lors de la mobilisation.


L'escadron d'artillerie de corps d'armée, en temps de guerre, se scinde en quatre batteries indépendantes placées sous deux commandements :


  • sous le commandement direct de l'état-major de corps d'armée :

    • la batterie d'acquisition et d'objectif (BAO)


  • sous le commandement de l'artillerie de corps d'armée :

    • la batterie de mise en œuvre qui devient batterie d'artillerie de corps d'armée (BACA)

    • la batterie NBC qui, renforcée par des réservistes, devient le régiment NBC


Il reste comme vous pouvez le voir la quatrième batterie qui est la batterie de commandement et des services qui, avec le poste de commandement de l'escadron, prend en charge la compagnie de recherche du renseignement rattachées au corps d'armée.


Au 1er janvier 1989 et en temps de paix, seul le 39ème escadron d'artillerie de corps d'armée est en ligne au sein du 1er corps d'armée. Il réunit les quatre batteries énoncées supra. Pour les 2ème et 3ème corps d'armée, nous ne trouvons que deux batteries d'artillerie de corps d'armée (64ème BACA et BACA 3).



Voici ci-après un schéma type des unités organiques de corps d'armée après mobilisation :





Présentons maintenant le détail de chaque corps d'armée après mobilisation :


- - - / - - -

1er CORPS D’ARMÉE :

- - - / - - -
2
ème CORPS D’ARMÉE :

- - - / - - -

3ème CORPS D’ARMÉE :

- - - / - - -
FORCE D'ACTION RAPIDE :


TABLEAU DE COMPARAISON :


Dotation théorique du corps d'armée

Dotation réelle des trois corps d'armée

Total

Arme

Corps d'armée type

1er corps d'armée

2ème corps d'armée

3ème corps d'armée

Arme blindée cavalerie

1 régiment

1 régiment

1 régiment

1 régiment

3 régiments

Artillerie

7 régiments

1 escadron

7 régiments

1 escadron

9 régiments

1 batterie

8 régiments

1 batterie

24 régiments

1 escadron

2 batteries

Aviation légère de l'armée de terre

1 régiment

1 groupe

1 régiment

1 groupe

1 régiment

1 groupe

1 régiment

1 groupe

3 régiments

3 groupes

Génie

2 régiments

1 régiment

2 régiments

2 régiments

5 régiments

Infanterie

1 compagnie

1 compagnie

1 compagnie

1 compagnie

4 compagnies

Train

3 régiments

3 régiments

3 régiments

3 régiments

9 régiments

Transmissions

2 régiments

2 régiments

2 régiments

2 régiments

6 régiments

Total

16 régiments

1 escadron

1 groupe

1 compagnie


15 régiments

1 escadron

1 groupe

1 compagnie


18 régiments

1 groupe

1 batterie

1 compagnie


17 régiments

1 groupe

1 batterie

1 compagnie


50 régiments

1 escadron

2 groupes

2 batteries

3 compagnies




En ce qui concerne les 1er, 2ème et 3ème corps d'armée, la situation en matière de chiffres est globalement bonne.


Nous pouvons voir que d'une manière globale, les deux derniers corps d'armée ont un excédent alors qu'il manque une unité de taille régimentaire au 1er corps d'armée.


Cependant, en étudiant à la fois les schémas et les chiffres, nous pouvons voir qu'il manque en fait :


  • un régiment d'artillerie « MLRS » pour les trois corps d'armée. Il est compensé par deux ou trois régiments d'artillerie Sol-Sol supplémentaires dans les trois corps d'armée, ce système d'arme ne sera en dotation qu'à partir de 1990 et ne concernera finalement que deux unités sur les trois prévus au départ


  • un régiment d'artillerie Sol-Air « Roland » et un régiment du génie pour le 1er corps d'armée, manque compensé par deux unités similaires affectées à la division du Rhin qui pourraient être détachées au 1er corps d'armée.


Passons maintenant à la Force d'Action Rapide qui, selon le schéma présenté, est presque totalement dépourvue d'éléments organiques ne comptant que cinq unités sur les vingt et une unités de référence. En effet, nous ne retrouvons que deux régiments (circulation routière – train – transmissions) et deux compagnies (circulation routière et infanterie).


En cela, nous pouvons écrire que cette « Force » n'est pas considérée comme un corps d'armée à part entière mais plus comme un corps expéditionnaire qui doit être doté de moyens Ad Hoc en fonction des circonstances.


De plus, si nous analysons en profondeur ce corps auquel nous ajoutons ses cinq grandes unités de combat, il en ressort que :


  • pour l'Arme Blindée Cavalerie :

    • le régiment de découverte armé d'engins de type AMX-10RC est présent à raison de deux unités dans la 6ème division légère blindée


  • pour l'Artillerie :

    • s'il manque bien tous les éléments d’artillerie de corps d'armée, mentionnons que les quatre régiments d’artillerie divisionnaire ont une dotation accrue d'armes Sol-Air de type canons de 20 mm tout comme le régiment d'infanterie de la 4ème division aéromobile


  • pour l'Aviation Légère de l'Armée de Terre :

    • la 4ème division aéromobile rassemble à elle-seule plus d'engins volants que les trois corps d'armée réunis.


Pour les autres armes soit la dotation est diminuée et devra être complétée par des unités en réserve générale, soit la Force d'Action Rapide s'appuiera sur un autre corps d'armée ou sur la réserve générale.





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