Entre réalité et prospective :
   L'armée de terre française en janvier 1989
 
David DELPORTE
 
 

LES DIVISIONS LÉGÈRES BLINDÉES

 

MISE A JOUR DU 14 AVRIL 2019

 

Après avoir présenté les divisions blindées d'active, tournons nous maintenant vers les divisions légères blindées.
 

Au 1er janvier 1989, le corps de bataille de l'armée de terre dispose de deux divisions légères blindées constituées de troupes d'active et de deux divisions légères blindées – école mises sur pied à partir des écoles, centres d'instructions et autres unités de réserve qui sont les :


  • 6ème division légère blindée à Nîmes

  • 9ème division d'infanterie de Marine à Nantes

  • 12ème division légère blindée – école à Saumur

  • 14ème division légère blindée – école à Montpellier

La première unité d'active est la 6ème division légère blindée, stationnant dans la 5ème région militaire. Elle est créée en 1984 par l'amalgame de régiments non endivisionnées et d'unités des défuntes 6ème division blindée, 14ème division d'infanterie et 31ème brigade.

 

C'est l'unité type en tant que telle. Nous pourrons voir que cette division légère blindée est un concept novateur de par son agencement.

 

Mettant de côté le fait qu'elle est plus une grosse brigade qu'une division au sens « otanien » du mot, elle présente un caractère novateur. Il s'agit du mélange entre ses deux régiments de cavalerie mettant en ligne soixante-douze engins appui-feu de type AMX-10 RC à canon de 105 mm et ses deux régiments d'infanterie montés sur « VAB ».

 

Jusqu'à présent, nous n'avions du côté de l'OTAN que des unités lourdes à base de chars ou d'infanterie mécanisée ou des unités légères à base d'infanterie portée. La France trouve un juste milieu avec cette division légère blindée puisqu'elle allie la puissance de feu, la vitesse et la maniabilité. Les soviétiques ne s'y tromperont pas puisqu'ils considéreront les engins appui-feu de type AMX-10 RC à canon de 105 mm comme de véritables chars de bataille.

 

Cette division légère blindée reprend les traditions des unités de l'armée d'Afrique puisqu'elle porte tout d'abord le même numéro que la 6ème division légère de cavalerie constituée en 1940 en Afrique du Nord et que la majorité de ses unités possèdent une histoire commune à la présence militaire en Afrique et aux combats de la libération de 1944.

 

La seconde unité d'active est la 9ème division d'infanterie de Marine qui est présente en 3ème région militaire depuis de nombreuses années sous cette appellation ou sous celle de « 9ème brigade d'infanterie de Marine ».

En effet, cette unité reprenant le numéro de la 9ème division d'infanterie coloniale, est la synthèse de toutes les unités de Marine. Son histoire depuis 1962 est liée à l'intervention outre-mer en lien avec la 11ème division parachutiste. Agissant sous le vocable « brigade » dans les années 1960-1970 puis « division » depuis le milieu des années 1970, elle incarne les interventions africaines de notre armée de terre.

 

Au départ, unité d'infanterie pure, elle se transforme entre 1984 et 1988 en une division légère blindée de par la transformation du 1er régiment d'infanterie de Marine en une unité de cavalerie légère. C'est à la fois une unité d'intervention outre-mer et une unité médiane capable de s'engager en Europe de l'ouest.

 

D'abord constituée sous la forme d'une division d'infanterie classique lors de la réforme de 1977, elle est formée d'un régiment de cavalerie légère dotée de soixante deux automitrailleuses légères de type AML-60 et AML-90 et de trois régiments d'infanterie portée sur camionnettes tactiques.

 

En 1984, lors de la création de la Force d'Action Rapide, elle troque ses automitrailleuses légères datant de la guerre d'Algérie pour toucher trente-six engins de reconnaissance-feu de type ERC90 « Sagaie ». Elle reste néanmoins une division d'infanterie motorisée au même titre que les 8ème et 15ème division d'infanterie. Cependant son régiment de cavalerie légère est apte au transport par avions de transport de type C160 et au combat sur le sol africain ou autre théâtre exotique.

 

En 1988, elle se mue définitivement en division légère blindée par la transformation du 1er régiment d'infanterie de Marine en véritable régiment de cavalerie légère avec trente-six engins de reconnaissance-feu de type ERC90 « Sagaie » ce qui double ses capacités d'engins appui-feu.
 

Mentionnons également que ses deux escadrons anti-chars ne sont pas dotés de « VAB-HOT » mais de véhicules légers tout-terrain dotés de missiles MILAN. Il en va de même de son régiment d'artillerie qui est doté de 24 obusiers de 105 mm de type HM2 en lieu et place des 24 obusiers de 155 mm de type BF-50.

 

Les 6ème division légère blindée et 9ème division d'infanterie de Marine sont rattachées à la « Force d'Action Rapide » et en constituent le coup de poing blindé en compagnie de la 4ème division aéromobile.

 

C'est un concept révolutionnaire en Europe car ces deux divisions que l'on pourrait qualifier de « légère » face aux unités blindées classiques, opèrent à une vitesse jamais vu alors en appui de la division aéromobile. C'est un véritable « uppercut antichar » mis à disposition de notre Armée de Terre.

 

Les 12ème et 14ème divisions légères blindées - école, sont des unités singulières car elles ne se ni d’active, ni de réserve. Ces deux grandes unités, mises sur pied en temps de guerre par les stagiaires et instructeurs des écoles et comprenant une large part de personnels d’active, n’existent en temps de paix que sur le papier.

 

La dissolution des 12ème et 14ème divisions d’infanterie en 1983 – 1984 permet de réduire les effectifs devant être soustraits des comptes de l’État-Major de l'Armée de Terre. C'est la réponse à la réforme dite de 1984 conduite par Monsieur Charles HERNU, ministre de la défense.

 

Les numéros de ces deux grandes unités sont repris par ces deux divisions singulières qui remplacent dans l’ordre de bataille les 131ème et 141ème divisions d'infanterie - école du plan de mobilisation prévu en 1977.

 

Nous assistons donc à la naissance de deux unités compilant des unités d’active, des unités de manœuvre issues des écoles et des unités de réserve.

 

La première unité est la 12ème division légère blindée – école qui est mise sur pied en 1984 par transformation de la 141ème division d'infanterie - école avec adjonction de moyens venant de la 131ème division d'infanterie « école ».

 

Bien que suivant l'architecture des divisions légères blindées, c'est son matériel qui diffère totalement de la dotation théorique.

 

En effet, au point de vue des unités de cavalerie, en lieu et place des soixante-douze engins appui-feu, nous dénombrons un total de quatre-vingt-deux engins blindés répartis entre trente-six automitrailleuses légères de type AML-90, trente-cinq chars bataille de type AMX-30B, huit engins appui-feu de type AMX-10 RC et trois ERC-90 Sagaie.

 

De même, les deux régiments d'infanterie ne sont pas de type motorisé mais de type porté. La protection n'est pas du tout la même, puisque pour les unités portées, les camionnettes tactiques de type « GBC-8KT » ou « TRM-4000 » n'ont aucune protection balistique.

 

De plus, nous n'avons qu'un escadron antichars monté tout au mieux sur des véhicules légers tout-terrain avec missiles « MILAN » mais pouvant être doté de canons sans recul de 106 mm portés par de vénérables Jeep Willis ou Delahaie.

 

La seconde unité est la 14ème division légère blindée – école est mise sur pied en 1984 par transformation de la 151ème division d'infanterie – école. Cette unité « école » gagne en puissance puisque ses moyens en matière de blindés sont de cent-sept engins blindés répartis entre quatre-vingt-trois chars bataille de type AMX-30B/30-B2, seize engins appui-feu de type AMX-10 RC et huit engins appui-feu de type ERC-90 Sagaie.

 

De plus, du point de vue de l'infanterie, le 3ème régiment d'infanterie est une unité mécanisée comme celle dédiée aux divisions blindées mais sa compagnie de chars n'est dotée que de douze chars de bataille de type AMX-30B. Le 4ème régiment étranger d'infanterie est quant à lui une unité d'infanterie portée.

 

La 14ème division légère blindée - école est une véritable division blindée en miniature.

 

Les 12ème et 14ème divisions légères blindées - école doivent se mettre sous les ordres en temps de guerre du 1er corps d’armée, en compagnie des 1ère et 7ème divisions blindées. Ce corps d'armée, en compagnie du 2ème corps d'armée affecté en Allemagne, est placé sous les ordres de la 1ère armée.

 

L'organisation théorique des divisions légères blindées est ainsi faite en termes d'unités de mêlée, d'appui et de soutien :


Cependant, comme nous avons pu le dire plus haut, cette organisation type n'est valable que pour les 6ème division légère blindée et 9ème division d'infanterie de Marine.
 

La division légère blindée « modèle 1984 » est une grande unité interarmes de combat d'un effectif de 7 625 hommes et doté de 2 104 véhicules. Elle comprend donc :

 
  • quatre unités de mêlée :

    • deux régiments issus de l'Arme Blindée Cavalerie, des Troupes de Marine ou de la Légion Étrangère,

    • deux régiments d'infanterie motorisée issus des Troupes de Marine ou de la Légion Étrangère,

  • deux unités d'appui :

    • un régiment d'artillerie tractée,

    • un régiment de génie,

  • une unité de soutien :

    • un régiment de commandement et de soutien.

La division légère blindée « type » est donc équipée d'un matériel spécifique listé ci-dessous :

 
  • 72 engins blindés de reconnaissance-feu de type AMX10-RC dotés chacun de :

    • un canon de 105 mm F2 BK MECA L/48 en armement principal,

    • deux mitrailleuses de 7,62 mm modèle AANF1 en armement secondaire dont une en co-axiale.

  • 340 véhicules de transport blindés de type « VAB » :

    • VAB-P : véhicule de transport de troupes avec une mitrailleuse de 12,7 mm ou d'une mitrailleuse de 7,62 mm modèle AANF1

    • VAB-PC : véhicule de commandement avec une mitrailleuse de 12,7 mm ou d'une mitrailleuse de 7,62 mm modèle AANF1

    • VAB-RATAC : véhicule radar

    • VAB-RASIT : véhicule radar

    • VAB-SAN : véhicule sanitaire

    • VAB-VOA : véhicule d'observation d'artillerie dotée d'une tourelle d'observation

  • 56 véhicules anti-chars :

    • 24 véhicules anti-chars de type VAB-HOT avec poste de tir de missiles Sol-Sol anti-char (quatre rampes de lancement par poste de tir)

    • 32 véhicules antichars de type VAB-MILAN avec poste de tir de missiles Sol-Sol antichars (quatre rampes de lancement par poste de tir)

  • 94 bouches à feu diverses :

    • 24 obusiers tractés de type BF50 à canon de 155 mm

    • 70 canons de 20 mm antiaériens de type 53T2 montés sur camionnettes tactiques

  • 48 systèmes d'arme portatives à très courte portée de type « MISTRAL »

  • 12 véhicules de type VAB-MORTIER tractant chacun un mortier de 120 mm Rayé Tracté Modèle F1

Pour rappel, les soixante-douze engins blindés de reconnaissance-feu de type AMX10-RC sont remplacés par autant d'engins de reconnaissance-feu de type ERC90 « Sagaie » pour la 9ème division d'infanterie de Marine. Au lieu des 7 625 hommes et 2 104 véhicules réglementaires, cette unité compte 7 392 hommes et 2 030 véhicules.

 

En ce qui concerne les 12ème et 14ème divisions légères blindées – école, en dehors du fait qu'elles ne respectent pas l'architecture type, le matériel est plus que disparate. Celui-ci sera étudié dans les chapitres consacrés aux unités régimentaires mais nous pouvons donner les éléments suivants :

 
  • la 12ème division légère blindée – école, c'est :

    • 6 000 hommes,

    • 1 200 véhicules,

    • 50 véhicules blindés à roues dont 36 AML-90, 8 AMX 10 RC et 3 ERC Sagaie,

    • 35 chars de type AMX 30 B ou AMX 30 B2,

  • la 14ème division légère blindée – école, c'est :

    • 6 000 hommes dont 1 500 réservistes,

    • 200 véhicules blindés dont 83 chars de type AMX 30 B ou AMX 30 B2 et 15 AMX 10 P,

    • 1 500 véhicules à roues dont 16 AMX 10 RC, 8 ERC Sagaie et 3 VAB / HOT,

    • 50 pièces d'infanterie et mortiers lourds,

    • 36 postes de tir antichar MILAN,

    • 5 000 FAMAS.

Après avoir présenté d'une manière théorique ces unités, voici ci-dessous le détail des quatre divisions légères blindées :

 

- - - / - - -

6ème DIVISION LÉGÈRE BLINDÉE :

- - - / - - -

9ème DIVISION D'INFANTERIE DE MARINE :

- - - / - - -

12ème DIVISION LÉGÈRE BLINDÉE "ÉCOLE" :

- - - / - - -

14ème DIVISION LÉGÈRE BLINDÉE "ÉCOLE" :

  

- - - / - - -

RECAPITULATIF DES MOYENS BLINDES :

 
 

6ème DLB

9ème DIMa

12ème DLBE

14ème DLBE

Total

AMX-30B et 30B2

/ …

/ …

35

83

118

AMX-10RC

72

/ …

8

16

96

ERC-90

/ …

72

3

8

83

AML-90

/ …

/ …

36

/ …

36

Total

72

72

82

107

333

 

Comme nous pouvons le voir, les deux division légères blindées – école ont un matériel disparate. Cependant, les cent-dix-huit chars de combat, trente-six automitrailleuses légères et trente-cinq engins appui-feu sont d'un apport non négligeable.

 

Il n'est plus à faire la présentation des engins des deux unités blindées de la Force d'Action Rapide. Il suffit de dire qu'en janvier 2013 (soit vingt quatre ans après janvier 1989) l'opération Seval au Mali est menée avec ces deux mêmes types d'engins appui-feu pour mesurer l'importance et la qualité de ce matériel.

 

Passons enfin à l'artillerie.

 

Il est à noter qu'outre les quatre batteries de tir sol-sol, une batterie de tir sol-air est affectée dans les régiments d'artillerie des 6ème DLB et 9ème DIMa au titre de la défense antiaérienne. On y trouve des canons de 20 mm antiaériens de type 53T2 montés sur camionnettes tactiques.

 

En effet, la Force d'Action Rapide ne possède pas de régiment d'artillerie antiaérienne de type Roland, Hawks ou 40 mm Bofors mais chacune des cinq divisions possède une batterie de tir sol-air affectée au régiment d'artillerie ou au régiment d'infanterie pour la 4ème division aéromobile.




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